Bourgogne 2015 - un grand cru

J’avais traversé le Morvan l’an dernier à la fin de mon périple dans les châteaux de la Loire. L’hiver dernier, j’étais passé brièvement à Beaune et dans le long de la côte des grands crus. À la vue des richesses du patrimoine Bourguignon, je m'étais promis de revenir et d’élargir le champ de mes visites. C'est chose faite depuis septembre 2015, mais il reste encore beaucoup à découvrir.

Paysage de la côte: escarpement oriental du Morvan descendant dans la plaine de la Saône

Débutons la visite par la capitale régionale.

Dijon a conservé un centre historique bien mis en valeur, et les restes du palais des Ducs offre de remarquables salles de la période faste. 

Il ne restera pas à Dijon que l'image de la moutarde.  

À quelques kilomètres au sud de Dijon, commence la côte d’or, véritable boulevard des grands crus. Jusqu’à Beaune, célèbre pour ses hospices, s’égrènent : Gevrey-Chambertin, Vougeot, Vosne-Romanée et Nuits St Georges. Et au sud de Beaune, c’est Pommard, Volnay, Meursault, Puligny-Montrachet que l’on traverse.

Ce terroir atypique, désigné par « les climats », a été classé au patrimoine mondial de l’Unesco le 4 juillet 2015

Le vignoble bourguignon référence quelque 1.247 climats, qui distinguent son terroir. Ce terme est officiel depuis 1935. Au fil de ses 2.000 ans de construction, il a acquis des spécificités sur chacune des parcelles qui le constituent. La terre est différente, la météorologie aussi. Altitude, relief, exposition, végétation, nature des sous-sols... Cet ensemble de facteurs, que doit prendre en compte chaque vigneron, crée une mosaïque de terroirs différents. La spécificité de chacune de ces terres délimitées naît aussi des choix de viticulture du producteur. Et c’est la raison pour laquelle un vin peut présenter une trame aromatique totalement différente d’un autre produit à quelques kilomètres seulement.

Hospices de Beaune

Les climats sont également définis par l’Histoire et le patrimoine de chacune des parcelles. Églises romanes, châteaux, abbayes se succèdent tout au long de la route en Bourgogne. La ville de Beaune et ses célébrissimes Hospices sont de parfaits exemples du poids du passé dans la distinction des climats. 

Palais des duc de Bourgogne à Dijon

La Bourgogne est une construction politique, œuvre des puissants ducs de Bourgogne au XIV et XVe siècle. Elle ne présente pas d’unité géographique. On y trouve les régions vallonnées du vieux massif du Morvan, des plaines fertiles, des régions plus ingrates au nord, mais surtout des coteaux calcaire, en bordure de la plaine de la Saône en particulier, qui font la gloire des grands vins. La Bourgogne s’étant de l’Auxois au Beaujolais, de la Loire à la Saône. Cette dernière constituant une frontière naturelle, autrefois avec le Saint Empire Romain Germanique, et aujourd’hui avec la Franche-Comté. A l’époque de Charles le Téméraire, le duché de Bourgogne possédait aussi les pays bas et les Flandres.

Vers le sud on arrive à Chalon/Saône avec ses quartiers anciens rénovés. Les paysages du vignobles Chalonnais sont particulièrement agréables autour de Mercurey.

À peine à quelques kilomètres encore plus au sud, on arrive à Tournus. C’est la limite entre langue d'oc et langue d'oye, entre ardoise et tuile ronde, entre nord et sud. La cathédrale St Philibert est d’inspiration clunisienne.

Quais de Saône à Mâcon

Ensuite,  Mâcon ouvre la porte vers les monts du Beaujolais et ses non moins célèbres crus ! Paysage de vigne depuis le sommet du mont Brouilly entouré des villages aux noms célèbres : Chénas, Fleuri, Juliénas, Villiers-Morgon, Saint Amour, Moulin à vent, Chiroubles

Un peu, à l'est, Bourg en Bresse, à cheval entre plusieurs provinces recèle un bijou avec l'abbaye de Brou du XVIe siècle au toit vernissé typique de bourgogne. 

Elle abrite des tombeaux célèbres de représentant des grandes dynasties d’Europe descendant des familles bourguignonnes comme : Marguerite d’Autriche, de sa mère Marguerite de Bourbon et de son mari Philibert le Beau (fait partie des symboles des grandes dynasties, avec les gisants des nécropoles des Plantagenets à Fontevraud, ou des rois de France à Saint Denis)

Tombeau de Marguerite d'Autriche Marguerite d’Autriche fut successivement princesse de Bourgogne, fille de France, infante d'Espagne et duchesse de Savoie. Elle est la petite-fille du duc de Bourgogne Charles le Téméraire. Une Européenne avant l'heure.

Si les ducs de Bourgogne eurent un rôle politique éminent dans le royaume de France en en Europe, les abbés de Cluny, dont plusieurs furent Papes, ont été au centre spirituel de la Chrétienté durant de nombreux siècle.  

Toute petite partie de ce qui reste de la plus grande église de la Chrétienté, avant la construction de St Pierre à Rome

L’abbaye connut un développement considérable et fut la maison mère d’un ordre religieux, directement rattachée à Rome, et qui compta plus de 1000 monastères dans toute l’Europe.

L’abbatiale était la plus grande église d'Europe avant la construction de st Pierre de Rome.

Richelieu en fut l’abbé à une époque où, en déclin, il redonna une jouvence aux constructions et resserra les règles monastiques.

Considérablement pillée et détruite à la révolution, les restes permettent tout de même de se faire une idée de l'ampleur des lieux. De remarquables reconstitutions 3D en réalité augmentée, permettent d'accompagner l'imagination.

écran orientable qui montre ce qui existait dans l'axe de vision.

Autour de Cluny, et disséminés entre Saône et Morvan, de nombreux villages sont plus intéressants les uns que les autres comme celui de Brancion par exemple qui a conservé une remarquable halle doté d'une très belle charpente.

L’ouest de la Bourgogne est occupé par le massif du Morvan austère, et mystérieux, avant de redescendre dans la vallée de la Loire ou de l’Yonne.

Les villages sauvages ne manquent pas dans les forêts du Morvan : Alligny en Morvan en est un exemple.

l’austérité des lieux se lit sur cette photo du café restaurant d'Alligny

Ce sont dans les clairières morvandiotes que sont cultivés une grande partie des sapins de noël vendu sur nos marchés en décembre.

Le sommet du Mt Beuvrai  (820m) hébergea un Opidum important : celui de Bibracte capitale des Éduens. (des Gaulois...).  Vercingétorix y avait rassemblé ses forces avant de se rendre à Alésia où il fut vaincu par Jules César.

Un magnifique musée moderne, dû à F Mitterrand, retrace de façon claire et pédagogique cette période méconnue de l'avant l'histoire de France.

Musée du Mt Beuvray, consacré à l’oppidum de Bibracte

Non loin du Mt Beuvrais, Autun pris le relais de Bibracte et fut, à partir du 3e siècle, une ville romaine importante, capitale des Gaule du Nord-est. Sa Cathédrale est dotée d’un tympan remarquable représentant le jugement dernier

Amphithéâtre romain d'Autun

Un peu plus au nord du Morvan on croise les anciennes routes des relais de poste allant de Paris vers le sud-est. 

Il en reste la N6 et le passage du TGV Sud-Est. Il reste aussi des relais gastronomiques prestigieux comme celui groupe Bernard Loiseau à Saulieu. La vielle ville compte aussi une église intéressante: la Basilique St Andoche dont les chapiteaux comme dans de nombreuses églises de style clunisien, sont particulièrement ouvragées.

Sur le versant ouest du Morvan, sur un monticule est installé le site de pèlerinage de Vézelay, un autre haut lieu de chrétienté encore très vivant. L’Abbaye bénédictines est consacrée à Ste Madeleine. 

Basilique de Veselay

Elle est célèbre aussi pour le tympan de son portail central à l’ombre du narthex (avant nef) de 1150 (mission des apôtres après la résurrection)

En regagnant le sud par Château-Chinon, et les magnifiques forêts du haut Morvan, on arrive en bordure du Charolais, à Paray-le-Monial. 

Paray le Monial

Sa basilique fut consacrée au sacré cœur, seulement au 19e siècle, mais la construction remonte à l’époque clunisienne.  

On est près du bassin du Creusot, le fief de Schneider, non loin de Monceau les Mines.

Voilà une découverte plus complète mais avec encore de nombreuses impasses en particulier sur le versant Loire et Yonne de la Bourgogne. Surement un appel pour poursuivre mon tour de France en passant de l’Auxois à la Champagne ou du plateau de Langres vers la Lorraine.